• Gregor Ozbolt et l’Everest de la natation !

    Gregor Ozbolt et l’Everest de la natation !
    Notre intervenant spécialisé en entrepreneuriat, Gregor Ozbolt, s’élancera entre le 9 et le 14 août 2019 (en fonction des marées et de la météo) pour une traversée de la Manche à la nage à la manière de Matthew Webb le 24 août 1875, premier nageur à réaliser cet exploit. Il souhaite ainsi faire partie des 30 français à avoir réalisé cette prouesse sportive. 33,7 km c’est la distance qui sépare Folkstone en Angleterre au Cap Gris-Nez en France.  Mais ce défi physique et psychique hors norme est une entreprise qui mobilise des compétences associées, des soutiens bénévoles, nécessite de monter un budget et de solliciter des sponsors comme des mécènes sans omettre une dimension humanitaire ! A mois d’un mois du top départ de ce challenge hors norme, Gregor nous présente son défi, l’Everest de la natation !

    Pouvez-vous présenter votre parcours d’entrepreneur ?

    J’ai toujours adoré explorer des domaines divers et variés dans mes projets professionnels mais aussi lors de mon voyage à l’étranger pendant plus d’un an. A mon retour en France, j’ai eu l’opportunité d’intégrer l’incubateur de l’EM Lyon pour créer une première société qui travaillait sur l’adaptation des logements pour les seniors en situation de dépendance puis une seconde dans le traitement de data. Après divers projets entrepreneuriaux, j’ai créé une société pour le groupe EDF avec 2 entrepreneurs, l’objectif était de travailler sur un modèle économique sur la dynamisation des centres-villes avec toutes les parties prenantes. Cette équipe fonctionne et le concept a été vendu dans plusieurs villes, cette société, commerçant + opérateur de dynamisation commerciale,  est en train de se développer.

    Aujourd’hui je fais du coaching en développement personnel (Gregor Ozbolt Coach) et j’ai monté des programmes d’intrapreneuriat pour le compte de grands groupes comme la ruche industrielle (consortium de EDF, SNCF, Volvo, Renault Trucks, Aldes, Bosch, La Métropole de Lyon et Vicat). J’aide des chefs de projet ou entrepreneurs internes à l’entreprise à se développer et à construire leur projet.  En parallèle je travaille depuis 14 mois sur mon challenge de la traversée de la Manche à la nage et j’interviens à AMOS sur la spécialisation entreprenariat.

    Comment est né ce projet de réaliser la traversée de la Manche à la nage ? Quels en sont les objectifs ?  

    Ce projet est né car j’avais envie de réaliser quelque chose d’incroyable, d’extra-ordinaire ! J’ai toujours beaucoup nagé. En revanche, je n’avais jamais fait de compétition. J’ai commencé à m’intéresser aux longues distances (1km, 5, 10, 25 km) parce que cela m’amusait. Je me posais la question de savoir comment je pouvais progressivement augmenter le nombre de kilomètres parcourus. Le visionnage de la vidéo de Pierre Julian Pourantru qui a fait la traversée de la Manche en 2017, a été le déclic ! J’ai  utilisé le même outil que je propose à mes clients qui consiste à s’interroger sur ce que nous souhaitons laisser comme empreinte quand nous ne serons plus de ce monde. Quand on traverse la Manche, l’officiel de la Channel Swimming Association vous donne la courbe de votre traversée. J’ai envie de me voir vieillir avec cette courbe posée à côté de moi, c’est quelque chose qui m’anime.

    Le sport pour moi c’est le cheval de Troie, c’est la manière de développer le défi. Il ne s’agit pas uniquement d’un sujet uniquement sportif, c’est un challenge introspectif, intérieur, très particulier.

    Cela fait un peu plus d’un an que le défi s’est lancé. L’objectif est simple, j’ai un « slot » comme on l’appelle dans le jargon des personnes qui traversent la Manche, entre le 9 et le 14 août, je me dirige là-bas avec mon équipe et en fonction de la météo on attend pour me donner le top départ.



    Quel parallèle faites-vous entre votre métier d’entrepreneuriat et votre projet ? Comment l’avez-vous construit?

    Ce projet, je l’ai construit exactement comme le développement d’une société. Je fais un vrai parallèle entre mon projet sportif et mon métier d’entrepreneur et coach. Premièrement, je me suis posé la question de savoir ce que je devais apprendre pour pouvoir réaliser mon objectif, cela veut dire : quelles techniques maitriser ? Comment ? De quelle manière ? et surtout de qui dois-je m’entourer ?

    Je travaille beaucoup en éco-système. Pour construire mon projet, je suis allé chercher des personnes qui étaient meilleures que moi dans leur domaine et qui m’ont partagé leurs conseils pour construire mon propre projet. C’est un peu comme cela que j’ai monté mes structures en tant qu’entrepreneur. J’ai aussi échangé avec des personnalités comme Philippe Croizon, explorateur, Mathieu Tordeur, pour préparer ce challenge. Ma certification de coach m’a donnée énormément d’outils de travail. Le projet est très structuré mais je garde aussi une part de ressenti dans mon approche de la préparation. Il faut garder le plaisir de nager !

    Je suis allé voir Mathieu Thivolle, le directeur général de l’EMS Bron Natation pour lui demander d’être mon coach natation et préparation au froid.  Il y a peu de gens aussi fous dans la région, qui ont envie de partir en février avec un kayak en plein milieu du lac de Miribel-Jonage à 7h du matin sur une eau à 9° (rires). J’ai choisi Mathieu comme coach car il avait déjà vécu une traversée de la Manche à la nage, et au-delà de cela il a une intelligence forte. Selon lui, « ce n’est pas parce que j’ai vécu une traversée qu’on va répéter exactement la même chose ». Nous utilisons, comme les sportifs de haut-niveau, les techniques de visualisation . J’apprends tout de suite à mon cerveau que tout ce qu’il va découvrir ne va pas être nouveau. Je me suis entouré d’un préparateur mental, spécialiste en gestion des émotions, Gérard Cervi. Il  a suivi Philippe Croizon dans sa traversée de la Manche. Nous travaillons la méditation pleine conscience et les techniques de Programmation Neuro Linguistiques. Je travaille aussi avec un médecin du sport spécialiste de l’ultra-marathon pour la team Asic, le Dr Arthur Molique.

    Comment prépare-t-on la traversée de la Manche à la nage ?

    Cette traversée de la Manche, c’est l’Everest de la natation ! La préparation au froid est extrêmement importante dans ce défi, car je vais nager en maillot de bain, sans combinaison afin de respecter la tradition mais aussi car le rapport à l’eau, à la nature n’est pas le même.  Le corps est enduit de graisse afin de retenir la chaleur. L’objectif est de boucher les pores de la peau afin de garder la chaleur à l’intérieur et éviter une déperdition trop grande. J’ai pris tous les jours ou presque des bains froids de 30 minutes immergé dans de l’eau entre 10 et 14 degrés. Le plus gros défi que j’ai surmonté c’est le froid. Mon record aujourd’hui est de nager 1h30 dans de l’eau à 9° sans protection (sans graisse). Si l’entraînement a été bon, le froid ne sera pas un problème. Lors de ma traversée au mois d’août, l’eau devrait avoir une température entre 13 et 16 degrés sur un temps  que je prévois de minium 12 heures.



    La traversée se prépare comme un marathon. Il y a une préparation physique, physiologique, un entraînement du corps à tourner les bras. Cela se prépare avec 6 sessions de minimum 1h30 de natation et 2 sessions de renforcement musculaire par semaine. A cela s’ajoutent des sessions d’entraînement plus longue de 4h.

    Je me suis entraîné dans différentes conditions : océan déchaîné pour voir ce que cela donnait avec de bonnes vagues à négocier, j’ai fait des courses entre St Tropez et Pampelonne, des 15 kms. Au mois d’avril 2019, j’ai passé un premier test qui consiste à prouver que tu peux nager dans de l’eau en dessous de 15 degrés pendant plus de 6h. Ce test a été fait dans de l’eau à 13° à Palavas-les-Flots. C’est une obligation de passer cette épreuve pour traverser la Manche. Une fois cette épreuve réussie, j’ai réservé un bateau accompagnateur pour réaliser la traversée. Aujourd’hui j’ai fait tout ce qu’il était possible pour réaliser un objectif comme celui-ci. L’important dans cette préparation est de bien veiller à la sécurité, ne pas se mettre en danger. Mon coach était présent à chaque entraînement, il m’accompagnait en kayak.


    Course St Tropez


    Coach

    Quand je suis dans l’eau, je me vois arriver en levant les bras de l’autre côté de la Manche ! Je me dis que si je veux réaliser quelque chose d’extraordinaire, il faut être capable de sortir de sa zone de confort à chaque fois. C’est cela qui m’a porté tout au long du projet.

    Quel est ton objectif sur cette Traversée ?

    Le record de la Traversée de la Manche est de 6h55[1], c’est-à-dire qu’il faudrait que je nage à la vitesse où je sprint aujourd’hui au 100 m. Ce n’est pas mon objectif. Mon objectif est d’être le 19ème français à lever les bras de l’autre côté de la Manche et inscrire mon nom dans le pub anglais où l’ensemble des finishers de la traversée de la Manche sont mentionnés. La Traversée de la Manche n’est pas réservée à de « purs sportifs ». C’est un véritable challenge personnel de réussir à arriver de l’autre côté.
    [1] Le record masculin de la durée de traversée est détenu depuis le 8 septembre 2012 par l'Australien Trent Grimsey en 6 h 55 min – source  « Channel swimming records | Dover.UK.com »



    Comment réussissez-vous à concilier votre métier et votre préparation pour cet exploit sportif ?


    J’organise mon temps en fonction de mes projets pour me laisser du temps pour relever mon défi. Je souhaite garder mon activité d’entrepreneur en parallèle de mon projet de traversée. La préparation de la Traversée de la Manche à la nage me prend entre 2 et 3h par jour, ce qui me permet de poursuivre en parallèle mon activité d’entrepreneur. J’allie l’entreprenariat et l’exploit sportif dans la manière de le structurer, dans sa préparation.

    Peux-tu nous décrire tes 12 heures de traversée de la Manche ?

    Pendant la traversée, je n’aurai qu’un objectif : me mettre dans l’eau, nager, manger et lever les bras à l’arrivée ! Le bateau accompagnateur s’occupe du reste, à savoir, la gestion des cargos et des courants. Mon bateau, c’est mon guide, le point à suivre. Le choix de la fenêtre météo se fait avec mon pilote selon les conditions météo et nos échanges. Je risque de partir de nuit. A bord du bateau, il y aura une équipe de 4 personnes pour me guider et me soutenir : l’officiel de la Channel swimming association, le pilote, mon coach et ma compagne.

    Pour manger, interdiction de toucher le bateau et de s’appuyer dessus : nous avons inventé une perche de 5m pour mes ravitaillements : eau, bouillon, barres à base de dattes. Je m’alimente beaucoup au feeling, quoiqu’il arrive je mange toutes les 30 minutes. C’est une course avec soi-même, c’est intéressant. Il y a plein de paramètres qui font que cela peut s’arrêter.



    Comment as-tu financé ce projet ?

    J’ai créé une campagne de crowdfunding que j’ai partagée avec des proches mais aussi des entreprises. Un grand merci aux 47 donateurs sur la cagnotte et aussi aux entreprises qui nous font l'honneur de nous aider : VicatFlexDevFrance Sciage Béton, la famille Voituret, Brice Chambard obiz, Marketing & Cies, Fabrice Liut. Cela va nous servir à financer la traversée (Bateau/Association/ Logement/Equipement). Un grand merci pour votre confiance, le budget est bouclé. La traversée permet aussi de mettre en lumière l'Association Cassandra ACCL de Xavier Broutin que je vous invite à  suivre. Cette association finance la recherche contre les cancers chez l’enfant.


    Gregor avec Xavier Broutin de l'association Cassandra



    Comment te sens-tu à 3 semaines de la traversée ?

    Je ronge mon frein. J’ai envie d’y être. J’ai peu d’appréhension car j’ai beaucoup travaillé sur mes peurs. J’adore le moment avant de démarrer la traversée, je le trouve génial car il n’y a pas la problématique de résultat. C’est le moment où on a une concentration phénoménale. J’ai hâte de voir comment je vais réagir et quelles émotions cette traversée va me procurer. Enfin, je rêve d’un seul moment : celui où mon bras va toucher le sable de la plage à l’arrivée. Je me suis lancé le défi il y a un an et c’est juste génial d’être à quelques jours de le réaliser !



    Un conseil pour nos AMOSciens qui souhaitent se lancer dans l’aventure entrepreneuriale ?

    Si vous avez une intuition, quelque chose qui vous porte, il faut essayer, tester et  s’entourer ! Eviter de vous mettre des barrières personnelles. On passe beaucoup trop de temps à s’interdire de se lancer. Lancez-vous et construisez votre projet. L’important est le chemin parcouru pour le réaliser.

    Même si je ne réussis pas la traversée, j’ai déjà réalisé 90% du travail. Peu importe ce qu’il se passe, j’aurais fait tout ce qui était en mon pouvoir aujourd’hui pour tenter de réussir cette aventure. Je garde plein de beaux apprentissages.

    Comment suivre le projet ?


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    Découvrez le reportage réalisé par France 3 Auvergne-Rhône Alpes lors d’un entrainement de Gregor Ozbolt au lac de Miribel.

     


    Propos recueillis par Anne-Charlotte Meyer, chargée de communication, AMOS Lyon

     

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