• Interview de Nicolas HULOT : « Le temps est venu…."

    Interview de Nicolas HULOT :   « Le temps est venu…."
    Le créateur  de la « Fondation pour la Nature et l’Homme » que l’on ne présente plus a effectué sa première rencontre avec le sport dans sa jeunesse sur le mode classique de la compétition avec beaucoup de sports plutôt comme « généraliste » selon son  mot pour gouter désormais aux sports de glisse dans la convivialité mais tout en gardant   les exigences de la notion de  discipline qui est attachée au sport. Nicolas Hulot  a fait évoluer sa pratique en complicité avec la nature, avec une dimension souvent onirique  mais dans la discipline, qu’il s’agisse du snow hors piste ou du parapente. Il  insiste sur les paramètres intuitifs associés à la maîtrise que le sport exige. Devenu amateur assidu de Kitsurf  il ne  manque pas une occasion de profiter de ses rares moments de liberté pour s’y adonner sans pensée négative  ne serait-ce qu’une heure  équivalant de fait pour lui à huit jours de thalassothérapie : « c’est  mon point d’équilibre en quelque sorte ». Durant le confinement lié au Covid  19 au cours d’un direct avec les étudiants d’AMOS  le créateur de l’émission culte «  Ushuaia »  nous a donné son éclairage sur le sport aujourd’hui,  ses vertus, son économie, ses risques et ses bienfaits  et bien évidemment le tout en lien étroit avec le développement durable. A commencer par les JOP de Paris ayant participé lui-même  aux côtés de Tony Estanguet le Président du COJO à en affiner les objectifs concrets pour un sport…. durable lui aussi !

    Vous pensez que « le temps est venu » aussi pour les Jeux olympiques ?


    « Tout à fait. Le temps est venu pour les JO de se poser les bonnes questions comme pour  les autres activités humaines. Comme pour les autres évènements il est nécessaire de réduire nos impacts carbone ce qui a été intégré par Tony Estanguet pour les JOP de 2024. J’ai eu la possibilité de travailler avec lui et je dois dire que le Cahier des Charges des JOP est excessivement ambitieux  quant à l’impact des Jeux. Un des objectifs des JOP est d’avoir un impact neutre sur la planète et je lui ai suggéré de passer d’un impact neutre ce qui est bien à un impact positif : comment ? Je prends un exemple, celui d’Air France qui propose de compenser le rejet de 10 tonnes de CO2 dans l’atmosphère en investissant dans la reforestation capable d’assimiler ce CO2. Je tiens à préciser que des cabinets spécialisés travaillent précisément à établir en amont des évènements sportifs comme culturels leur bilan carbone. Pour les Jeux cela concerne aussi bien la construction du Village olympique susceptible d’accueillir des logements sociaux que des équipements éphémères dont les matériaux seront utilisés dans ce que l’on appelle l’économie circulaire. Et pour passer à un impact positif il faut développer des projets avec l’Afrique par exemple en redonnant à des sols appauvris la capacité de nourrir les habitants en compensant une tonne par une tonne et demie, ce qui est tout à fait possible mais doit être intégré dès la conception des évènements, ce que le COJO de Paris a engagé. »

    Cela concerne uniquement le haut niveau ?


    « Absolument pas car si le sport offre des spectacles magnifiques il est aussi une pratique de loisirs pour tous dont les impacts peuvent être aussi toxiques. Ainsi je me souviens qu’il y a vingtaine d’années, passionné d’escalade nous grimpions à des périodes qui perturbaient la nidification des oiseaux sans le savoir et que la plongée ne prenait pas en compte ces écosystèmes qui font la vie sur notre planète. Cela me donne l’occasion de rappeler que le vivant dans l’univers  n’est  présent nulle part ailleurs que sur la Terre ! Pour revenir à votre question ce sont toutes les pratiques sportives qui sont concernées et pour les Jeux Tony Estanguet et son équipe montrent l’exmple à suivre par tout un chacun dans sa pratique sportive. Les transports doux par exemple qui vont être utilisés durant les Jeux seront électrique ou à hydrogène. En réalité le sport doit prendre sa place dans le juste échange et pas dans le libre échange…»

    Le libre échange a été utilisé par Coubertin justement évoquant les JO comme une occasion d’échanger nos rameurs, nos escrimeurs etc.. ?


    « Ce qui me permet de préciser que si  ces échanges ont toujours leur intérêt bien sûr ce doit être pour échanger des valeurs. Lamartine disait que l’on échange plus facilement nos vices que nos vertus, et il en va de même pour toutes les activités humaines dont le sport qui doit demeurer le formidable ambassadeur des valeurs qui l’ont fait naître. Echangeons bien sûr mais pas n’importe quoi ni n’importe comment. Le « Juste échange » que je soutiens est celui qui donne du sens à la vie en échangeant les bonnes pratiques, les cultures et qui protègent la planète. Nous sommes responsables dans nos gestes quotidiens, ce qui entre de plus en plus dans nos mœurs mais qu’il faut étendre à toutes les activités humaines. En clair soyons solidaire avec le vivant. La vie ne tient qu’à un fil et nous faisons partie de la nature ! »

    Vous avez lancé un appel « Le Temps est venu » soutenu par un Prix Nobel des personnalités influentes dans la société notamment comment résumez cette invitation ?


    « Il faut de la méthode et j’insiste sur ce mot car  il est essentiel et doit être entendu à commencer par les étudiants d’AMOS bien sûr mais c’est ce que je conseille à la jeunesse. Pour cela il faut s’appuyer et développer la démocratie qui donne à chacun la possibilité et la responsabilité de faire advenir ce temps. Il faut redessiner un horizon nouveau qui gardera du monde d’avant, les avancées du progrès de la technologie, de la science, avec des limites  sans épuiser nos ressources et sans perturber les grands équilibres dont dépend le vivant. Le sport est un acteur de cette évolution en veillant à adapter ses moyens et ses finalités pour respecter la planète »

     
    Propos recueillis par Alain Arvin  Bérod, Directeur du Conseil de Perfectionnement et des Publications AMOS Group

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