• UN GRAND BOL D’AIR FRAIS

    UN GRAND BOL D’AIR FRAIS
    Avec six massifs en métropoles (les Alpes, le Jura, le Massif central, les Pyrénées, les Vosges et le Massif corse) et trois ultramarins (la Guadeloupe, le Massif des Hauts-de-La Réunion et la Martinique.), le domaine montagnard français couvre officiellement 23% du territoire national. Le marché du tourisme en montagne génère un chiffre d’affaire annuel de 9 milliards d’euros.

    Une saison freinée par le confinement


    Selon le bilan provisoire dévoilé par Domaines skiables de France le 5 mai 2020, la fréquentation des stations de ski française aurait reculé de 16% cette année par rapport à la saison 2018/2019.

    Cette saison a été marqué par le manque d’enneigement pour de nombreuses stations de ski mais surtout par la fermeture des stations suite au plan de confinement ordonné par le gouvernement.

    Rencontre avec François Gillaizeau, dirigeant d’un ensemble touristique dans les Pyrénées


    À l’origine de plusieurs établissements dans les Pyrénées, qu’est-ce qui vous a poussé à vous lancer dans cette aventure entrepreneuriale ?


    J’ai toujours eu l’esprit d’entreprise. Je suis issu du monde du sport, et le challenge, le but à atteindre m’ont toujours motivé… l’entreprise n’est finalement qu’une autre forme de match !

    Plus jeune, j’ai aussi été très investit dans le milieu associatif, et quand j’ai commencé dans le Tourisme, j’ai trouvé de l’interaction entre l’entreprise et le territoire dans lequel elle évolue, et là-aussi, l’entreprise n’est pas si loin du monde de l’association.

    Vous êtes dirigeant d’un ensemble touristique, pouvez-vous nous en parler ?


    L’ensemble touristique comprend un Centre de Vacances, un hôtel Bar Restaurant et un magasin de ski l’hiver qui se transforme en magasin de vélo et d’activités de montagne les autres saisons ou quand la neige n’est pas au rendez-vous.

    Mon activité évolue dans un écosystème global (comprenant la station de ski, mais aussi d’autres professionnels de loisirs, des fournisseurs locaux, des élus et des habitants), on ne peut pas exploiter son activité, sans s’intéresser et participer à la vie sociale et économique de son environnement. La Station est donc un support très important pour nous, et je m’y implique fortement.

    Quel est votre modèle économique ?


    Aujourd’hui mon modèle économique est très capitalistique. Ce qui veut dire, qu’on n’est en permanence en recherche de marge et de volume. Ce modèle (de l’ancien monde) à ses limites. Il pousse à la baisse des prix, qui affaiblit les entreprises, à l’utilisation de matières premières 1er prix, qui engendre des baisses de marge chez nos fournisseurs et l’utilisation de matériaux pas toujours responsable et enfin il cloisonne nos activités, sans se préoccuper des parties prenantes autour de notre activité, ce qui nous prive de certains services ou utilisation partagée avec nos voisins…

    Je commence donc à transformer mon entreprise vers un modèle qui tend vers l’économie de la fonctionnalité et de la coopération. C’est-à-dire : prise en compte de toutes les parties prenantes de notre écosystème, recherche de valeurs immatérielles, partage d’outils, de locaux, de service, optimisant l’usage et enfin intégration d’un certain nombre de process plus respectueux de l’environnement (socialement, écologiquement, économiquement…).

    Quels services proposez-vous à votre clientèle ?


    Avant de parler de service, il est intéressant d’aborder la notion de « Raison d’être ». Cette raison d’être doit être la tête de pont de toutes nos actions. Nous sommes donc là pour offrir aux gens un moment de détente et de loisirs (passif ou actif) leur permettant d’accéder à plus de bien être, dans un environnement naturel privilégié.

    Nous proposons donc à nos clients, des services d’hébergement, de restauration et de loisirs 4 saisons (je dirais même 5 saisons… printemps, été, automne, hiver avec neige et hiver sans neige…)

    Quelle place au développement durable ?


    Tout d’abord, pour la restauration, nous cherchons de plus en plus à travailler en circuit court et bête entière. Ainsi, nous proposons des produits de qualité, de saison, et avec une histoire à raconter. Ceci permet à nos producteurs locaux de se mettre en évidence auprès de nos clients et de récupérer 100% de prix vendu.

    Ensuite pour l’hébergement, nous avons supprimer presque tous nos produits jetables, nous sommes en projet de revoir entièrement notre système de production d’énergie (nous prévoyons une partie en autoconsommation, nous envisageons un vaste programme d’isolation, et enfin une politique d’achat intelligent, avec des consommateurs dont les pratiques sont opposées à nous, afin de mieux négocier nos achat).

    Enfin, pour la partie loisirs, nous nous efforçons d’investir sur des activités 4 saisons. Nos VTT (type FATBIKE) peuvent servir l’hiver sur la neige et l’été en forêt, nos trottinettes de montagne, se transforment en snowscoot l’hiver, nous avons un parc de skis de randonnée, nous permettant de skier avant l’ouverture de la station et après sa fermeture… bref, des investissements dont l’usage est optimisé, permettant une offre 4 voire 5 saisons !

    Quel est impact du réchauffement climatique sur votre activité ?


    Le réchauffement climatique amène de l’incertitude dans la programmation des vacances des touristes. Il faut donc commencer par éduquer le touriste, à ne pas vouloir quelques choses de précis au moment où il le veut. Pour faire simple, nous devons arrêter de vendre du ski, mais vendre la montagne… y’a de la neige on fait du ski, y’en a pas on propose autre chose. L’important c’est de ne pas laisser un client ou futur client sans une alternative intéressante. Cette éducation, permettra d’éviter aux prescripteurs de loisirs, de courir à l’investissement démesuré et irresponsable (ex : le tout neige artificiel). Bien sûr qu’il faut sécuriser l’activité économique, mais pas à tout prix.

    Comment se porte le tourisme montagnard suite à la crise sanitaire dû au covid-19 ?


    Le COVID a mis à terre le tourisme. Il va donc nous obliger à revoir nos modèles économiques durablement et de manière marquée. On ne pourra plus faire comme avant. Si nous ne faisons pas cet effort, nous ne nous remettrons pas de cette crise, et nous ne ferons jamais évoluer le système.

    Il faut revoir nos process d’exploitation (plus de transparence), redonner confiance aux gens, apporter de nouveaux services… bref, se réinventer.

    Quels sont vos projets futurs ?


    Notre projet futur est la conséquence de ce que je viens de dire avant : se réinventer !

    Nous allons donc essayer de transformer une de nos structures en « Centre Sportif ». Ça veut dire, augmenter légèrement la gamme de l’hébergement, diminuer légèrement aussi la capacité pour plus de confort, et proposer des services adaptés (salle de sport, de massage, sauna jacuzzi, salle multimédia, salle de séminaire, atelier vélo, système de chronométrage…). Ceci devrait nous permettre d’accueillir une nouvelle clientèle (club sportif de bon niveau), surtout sur la période printemps, été automne, sans pour autant se priver de la clientèle existante.

    Enfin, essayer de baisser nos coûts d’exploitation, par une meilleure maitrise de nos dépenses (énergétiques, alimentaire, sociale).

    Nous avons juste besoin qu’on nous donne d’un peu de temps pour monter ce projet.

     
    Propos recueillis par Mélek Mestiri, Chargée de communication

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